Albert Simeoni FranceTunisieInfo - La Goulette, racontée par Albert Simeoni et adaptée par Hamadi Djilani

« Après que D ieu ait crée le monde au bout de 6 jours, il jeta un œil sur son œuvre. Vu d’en haut, il s’aperçut qu’un petit espace était vide. Un espace étriqué coincé entre mer et grand étang sans nom à ses débuts. Plus tard, il fut nommé LA SEBKHA. Il jugea que cet oubli devait être comblé. Sans réfléchir, il posa son doigt sacré sur ce minuscule terrain vague, désert, et le sanctifia du nom DE GOULETTE. Quelques jours plus tard, Breitou le juif, Hamouda le musulman, Pépino l’italien, Taïta la juive, Fatma la musulmane et Marie la chrétienne sont nés par sa volonté.

Un miracle qui fut suivi par d’autres et qui se perpétua jusqu’en 1989, soit des siècles après la révolution française et toutes les révolutions du monde. Il inscrivit la cité balnéaire, sans passer par aucun organisme connu, PATRIMOINE UNIVERSEL, la ville de LA RAHA…DU TMENIC…DE LA JOIE…DES FÊTES …DES RIRES..DES PLEURS…etc… Citée balnéaire courue par les HARAOUISTES, les GRANAS, LES TUNISOIS , etc…Qui en firent leur lieu de villégiature.

Certaines familles d’entre elles sont tombées amoureuses de cette ville et ont décidé de s’implanter sans que tracasseries leur soient faites. Dieu décida ensuite que parmi ses habitants certains seront destinés à être des figures emblématiques de la cité. Des profils qui marqueront à jamais leur passage tant ces personnages étaient pour beaucoup des plaisantins, des pinces sans rire, des fedlagjiyé, des artistes n’ayant subi aucune formation théâtrale tant leur naturel débordait dans chacun de ses rares spécimens.

Dans la piccola chichilia, il créa LOUBIA, l’haricot, le maltais cocher bien connu, qui fouettait avec son cuir tous les garnements qui osaient s’accrocher à la barre fixe de son carrosse…Et lançait après eux ce mot de ‘…BASTARDI… ! bâtards. Il créa TCHICHO BELLO BELLO un italien qui clopinait du pied et qui mettait deux heures pour regagner sa place réservée au balcon du Rex alors que l’obscurité régnait. 7 casse-croutes en main, il venait à peine de s’asseoir, que le film se terminait.

D ieu créa JULES LE COIFFEUR, celui qui s’en foutait de tout et qui taquinait celui ou celle qui passait devant son échoppe aux murs sur lequel étaient épinglés milles postérieurs et seins de grandes artistes tant et si bien que l’on venait chez lui parfois non point pour se coiffer mais pour mater. ‘…Jé i taffar é’dè…Il venu mater celui là disait t’il. GRATTIS.

Il créa sur sa lancée JOJO MEIMOUN le manager de toutes les Équipes Sportives de l’USG. L’homme à l’index coupé jouait au volley avec ce qu’il avait, de mauvaises passes mais il disait que cela était voulu car en effet ses ballons mal ajustés, nous faisait courir à droite et à gauche pour les récupérer. Pour les mauvais joueurs, il leur enfonçait son doigt à l’extrémité coupé dans leurs flancs afin de remettre le récalcitrant sur le droit chemin. Une petite torture.

Achem créa aussi ROGER LELLOUCHE alias LELOU de son nom d’artiste. Un garçon au corps d’éphèbe qui tourna la tête à bien des hommes mariés ou pas. Premier homosexuel qui affichait son état sans aucune hypocrisie. Il donna le tournis à plus d’une jeune fille ou jeune femme lorsqu’il tournoyait sur la piste de L’HACIENDA. Acteur, il fit quelques apparitions dans le film le GUEPARD. ROGER était un artiste accomplit qui jouait beaucoup de ses charmes.

Dieu créa des sportifs de haut niveau qui ont gravé les tablettes du sport de notre ville. Parmi les niqués de la tête, GAGOU le jeune Gagou z’al, l’emmerdeur public bien connu à notre époque, qui nous retrouvait souvent pour casser notre ambiance de jeu. D’où qu’on le fuyait. La fin de sa vie en Israël fur marquée par un accident, sa jeune carrière se termina chez les rabbins, il devint louba.

CLAUDINE ALLOUCHE ma voisine, une jeune fille timide à cette époque nous fit l’honneur d’être devenue MISS TUNISIE. Une goulettoise MISS était un GRAND EVENEMENT à cette époque au vu des très belles filles tunisoises qui concouraient du coté du BELVEDAIRE je crois. Dans la catégorie des footballeurs, on retiendra FEU FOLLET, le jongleur du ballon de foot aux jambes d’asperges non assurées. C’était un PELE sans herbes mais PELE quand même.

MOUCHI mitro-bémout ou MOUSSELINE doit sa réputation comme employé aux GALERIES ALBERT, il ne savait pas mesurer. Un mètre chez lui valait 80 centimètres et lorsqu’il vous parlait, il fallait s’éloigner d’un mètre parce notre ami postillonnait à chaque mot. Celui qui a le plus marqué aussi son époque et que je me dois de rappeler à la mémoire des anciens L’ONCLE FRAGI AGOUBA. Le maitre d’œuvre de la cité qui sans lui la GOULETTE n’aurait pas été celle qui fut, tant sa gouaille était connue d’entre les deux canaux.

FRAGI z’al l’homme qui n’a jamais supporté perdre aux cartes poussait le vice jusqu’à étaler au rami POKER, 8 Jokers alors que les autres en avaient déjà deux en mains. La liste est incomplète. Si je devais citer tous les guignols, un livre ne suffirait pas sur les facéties de ses phénomènes que D ieu nous fit connaitre.

D ieu créa des ‘MATHEUX’, des MOKHS ( des cervelles). Des peintres, des écrivains, des pamphlétaires des chansonniers KIKI GUETTA, des directeurs de CINÉMA plein de bonté et de charisme ‘…DEPECHEZ VOUS. IL VA PLEUVOIR….Il créa DARIO et son jean i barbar (déglingué) avec le tournevis dans poche arrière et le bout de fil électrique, petit cordon de dépannage, qui pendait aussi d’entre ses fesses. LAHMI le directeur au costume bleu nuit de haute facture et son cinéma dont il gérait à sa guise la durée du film. Des hommes d’humour, des gens de bien.

D ieu créa la Goulette comme exemple à donner aux générations futures. Parce que notre génération toute confondues et celle qui a précédée ne s’est jamais faite la guerre à cause d’une poule passée chez le voisin et que, si un locataires n’avait plus d’eau, les autres venaient à son secours. Parce que si un BOUGAINVILLIER osait étendre ses feuilles par-dessus la muraille de l’autre coté du mur attenant, ce dernier profitait de cette ombre sans grogner. Et si CHOUILEM pissait sur un mur , le mur n’allait pas se plaindre à son propriétaire. Et si le cri d’un bébé, d’un nouveau né, venait à se faire entendre, les youyous s’entendaient jusqu’à la KARAKA. Et si TCHITCHO s’en est parti, c’est toute la CITEE qui était en deuil. Là tous les chapeaux sont mis en berne. La main sur le cœur. Et les yeux pleurant. »

 PAR ALBERT ABRAHAM SIMEONI BREITOU alias SOMELIER RICHARD adapté par HAMADI DJILANI